La Fondation BIAT a présenté une étude inédite sur l’enseignement de l’entrepreneuriat dans les universités en Tunisie, à l’occasion de la nouvelle édition des Cercles de l’Entrepreneuriat qu’elle organisait le 8 mai 2017 à Tunis.
Une centaine de participants (professeurs, étudiants, entrepreneurs, représentants des structures d’appui et de l’écosystème tunisien et international…) avaient répondu présents à l’invitation de la Fondation BIAT pour débattre de l’état des lieux et des pistes d’amélioration de l’enseignement de l’entrepreneuriat dans le pays.
Les enseignements de l’étude réalisée par Houda Ghozzi (enseignante à IHEC) pour le compte de la Fondation BIAT sont multiples mais convergent vers un constat partagé par l’auditoire: la culture entrepreneuriale est récente et encore assez peu transmise à l’université mais les initiatives se multiplient depuis quelques années. L’introduction de la « Culture entrepreneuriale » au niveau des licences, par exemple, ne date en effet que du début des années 2000.
13 masters spécialisés en entreprenariat sont proposés en Tunisie, dont seulement deux dans les universités privées. En école d’ingénieurs, seul existe le master DICAMP regroupant l’ENIT, l’IHEC et l’ESSECT. Quand au nombre d’étudiants, ils sont, chaque année quelque 300 à sortir diplômés de master spécialisés en entreprenariat.
L’étude réalisée par la Fondation BIAT a conduit à interroger 308 étudiants issus de 29 institutions multidisciplinaires, publiques et privées, à Tunis et dans les régions. Parmi eux, une très forte proportion (94%) ont bénéficié de cours sur l’entreprenariat mais seuls 24% ont eu plus de 3 cours.
Plus des ¾ des enseignants utilisent des méthodes interactives sur l’entrepreneuriat, dont 75% intègrent la réalisation d’un projet par leurs étudiants.
Selon les étudiants interrogés, les cours dispensés développent des compétences techniques (business model – 45% ; gestion de projet – 39%), la confiance en soi (42%) et l’esprit d’initiative (43%) mais peu l’autonomie (16%) où les connaissances financières (28%).
Autre enseignement de l’étude : la formation entrepreneuriale n’engendre pas une solide motivation à entreprendre : seuls 29% des étudiants disent en avoir une intention forte (8%) à le faire. D’ailleurs, même si 42% des interviewés trouvent très attractive l’idée d’entreprendre, et 41% disent probable de le faire, le passage à l’acte n’est qu’à moyen terme (58%) ou long terme (17%). Parmi les freins exprimés, le capital de départ (57%) et les risques financiers (44%) sont cités comme les principaux obstacles pour lancer un projet entrepreneurial. En revanche, la charge de travail ne fait pas peur aux étudiants qui ne sont que 14% à le craindre.
En synthèse de l’étude et pour ouvrir le débat, plusieurs constats ont été mis en avant :
- l’importance du rôle de l’enseignant et des méthodes pédagogiques dans l’intention entrepreneuriale ;
- une satisfaction moyenne quant à la qualification et à l’expérience des enseignants ;
- la nécessité d’évaluer, de suivre et de partager les bonnes pratiques.
Plusieurs intervenants tunisiens et étrangers ont fait part de leurs expériences des initiatives entrepreneuriales : Jihene Zouitene d’IHEC et Noomen Lahimer de MSB pour la présentation de programmes de formation intra-universitaire ; Houda Ghozzi d’Open Startup Tunisia pour la formation inter-universités ; Elyes Hachana d’Enactus pour ses initiatives de terrain.
Ivy Shultz, responsable du pôle entrepreneuriat de l’Université de Columbia (New York), ainsi que Jean-Michel Dalle, directeur de l’incubateur français Agoranov, étaient les témoins étrangers de cette 3e édition des Cercles de l’entreprenariat.
De toutes les présentations et interventions sont ressorties plusieurs nécessités :
- l’interaction entre le monde de l’entreprise et celui de l’université :
- l’université doit s’ouvrir et se décloisonner ;
- l’expertise entrepreneuriale doit pouvoir entrer dans les campus ;
- il faut impliquer davantage les entreprises dans l’université et favoriser les programmes d’alternance ;
- une formation adéquate des enseignants intégrant davantage l’expérience de l’entrepreneuriat ;
- une formation des étudiants sur l’entrepreneuriat plus concrète et moins livresque ;
- le développement des incubateurs pour conduire à la réussite des initiatives entrepreneuriales, avec des partenariats solides et pérennes entre les acteurs de l’incubation.
Pour une nouvelle stratégie de la formation en Tunisie
Le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, Moncef Boukthir, a appelé à développer une culture entrepreneuriale chez les étudiants et les diplômés du supérieur et à soutenir les projets innovants. S’exprimant à la cérémonie de clôture du concours de la meilleure initiative innovante et entrepreneuriale pour l’année 2022 pour les étudiants membres de l’organisation ENACTUS.Tunisie, Boukthir a rappelé le cadre juridique du statut de l’étudiant-entrepreneur-initiateur, qui permet de concrétiser des idées liées à des projets innovants.
Au cours de ses études universitaires, l’étudiant se voit offrir des possibilités d’encadrement, d’accompagnement et de formation par des professeurs universitaires dans le cadre du pôle étudiant-Entrepreneur qui a été créé au sein de plusieurs universités, a-t-il dit.